La nation ''Woodstock''

En 1969, la tension politique est palpable aux Etats-Unis, les affrontements souterrains avec le bloc soviétique amènent l'Amérique à envoyer des troupes au Vietnam du Sud menacé par une invasion au Nord. Beaucoup de jeunes américains enrôlés dans cette guerre n'adhèrent pas et prônent la paix bafouant le politiquement correct, ce qui est mal vu par une partie de la population.

Dans ce contexte, le célèbre festival de "Woodstock" prévu les 15, 16 et 17 Août 1969 a dû se battre pour trouver sa place. Il n'a pas pu s'organiser à Woodstock, village concentrant de nombreux artistes dont Bob Dylan et qui s'est rapidement sentit envahi. Il s'est tenu en réalité sur un pâturage à Bethel dans l'état de New York. L'évènement était vu d'un très mauvais œil par les commerçants et propriétaires de la région, voyant arriver un mois avant, une horde d'hippies idéalistes, des quatre coins des états-unis pour célébrer la paix et l'amour de la musique.

Des groupes indépendants cherchaient à bloquer l'accès ou faire peur aux festivaliers. Le mécontentement a pris un tournant politique, les opposants au projet formant des barricades pour s'opposer aux participants qualifiés de communistes, de mafieux.

De plus, dans un pays clivé par l'entrée en guerre du Vietnam s'ajoutait la révolte au sein de la communauté noire, qui un an après l'assassinat du pasteur Martin Luther King, appelait à renverser l'ordre établi.

C'est ainsi qu'un des organisateurs du festival a proposé au propriétaire d'un hôtel de White Lake, Elliot Tiber, de lancer un appel à la radio pour fédérer une nouvelle nation. Ce dernier, plein d'espoir a relayé cet appel: " Les organisateurs ont décidé que pour tous ceux qui vont arriver à partir de maintenant au festival de Woodstock, les concerts seront gratuits. C'est bien plus qu'un festival de musique et d'art ! C'est la naissance d'une nouvelle nation, la nation de Woodstock ! Nous sommes contre la guerre. Nous célébrons la liberté, la musique et les droits civiques pour toute la population."

Promesses tenues, pendant ces trois jours devenus complètement incontrôlables, où la jeunesse, réunie dans un chaos pacifique, incarnait une nouvelle réalité. ''Woodstock était à la fois une manifestation pacifique et une immense célébration.'' Richie Havens.

L'historien américain Maurice Isserman, pour qui l'évènement a eu une portée symbolique très puissante, en relate la résonnance historique: ''Parce qu'on pensait comme ça à l'époque, que notre culture était à part, différente. Ça ne veut pas dire, évidemment, que tous les gens sur place étaient politisés, qu'ils partageaient tous une vision hippie mystique, mais les années soixante ont été une décennie où les gens étaient convaincus qu'ils pouvaient faire l'histoire, qu'ils n'étaient pas le jeu de forces qui les dépassaient.''

En 1969, déclarée ''année érotique'' par Gainsbourg, la France a elle aussi vu éclore un vent de révolte avec les manifestations de Mai 68 et trois ans après la mort d'André Breton, un certain Jean Schuster, a décrèté la mort du mouvement surréaliste dans un article du Monde, intitulé ''Le Quatrième chant''. Les surréalistes qui incarnaient une exigence de révolution, ont protesté contre cette idée sans parvenir à se rassembler.

Mais l'esprit du surréalisme souffle depuis les années 30 sans jamais s'éteindre. En Amérique il a inspiré le célèbre poète Allen Ginsberg chef de file de la Beat Generation et alimenté le mouvement hippie des années 60 pour trouver son incarnation dans la nation ''Woodstock''. Le mouvement continue toujours de souffler, à nous de l'incarner aujourd'hui.

"Woodstock Three days of peace and music, Michka Assayas"

Commentaires